BENOIT DECQUE - ACCUEIL

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Benoît Decque, bombe à fragmentation





Serge Hartmann, DNA du 05 juin 2004.


Benoît Decque, bombe à fragmentation
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Il écume, sur le mode du jeu, les territoires de la peinture, de la sculpture et de l’installation. Portrait d’un adepte de la fragmentation.


C’était une métaphore de la pomme croquée par Adam et Eve : une ample installation de mille et une cartes, numérotées et signées, sur lesquelles apparaissait une représentation estampillée du fruit défendu. Libre au visiteur de succomber à la tentation du larcin et, ni vu ni connu, de s’approprier un fragment de l’œuvre de Benoît Decque. De fait, au final de l’exposition, plus de 800 cartes avaient disparu.
Il y eut aussi un Grand Jaune, tout aussi vertigineux puisque 1000 Post-it, également numérotés et signés, composèrent un vaste monochrome, monté dans une rue commerçante de Strasbourg, et donc susceptible d’être rapidement réapproprié par les passants. Ce qui ne manqua pas de se produire. A la grande joie de l’artiste. «Un Post-it, en soi, ne vaut rien. Mais parce qu’il est dérobé, il se charge d’une valeur symbolique que lui confère celui qui s’en empare. Ce qui me plaît beaucoup…», dit-il avant de résumer ce qui fait le sel de son travail: «Une certaine idée du partage.»De fait, ses pratiques artistiques induisent fréquemment un principe d’accumulation, à l’instar encore de ses grandes sphères réalisées sur du papier à l’aide d’une multitude d’empreintes de tampons martelant « Mais qu’elle est belle, mais qu’elle est bleue » (la planète, bien sûr), ou des lignes enchevêtrées, boules filandreuses tracées au stylo. Quand Decque n’évoque pas, dans une poésie minimaliste, le thème du voyage, avec une série de bouteilles remplies de petits bateaux pliés dans des cartes géographiques, dont on suppose qu’elles n’attendent plus qu’à être jetées à la mer.
Il en convient : issu d’une école d’architecture, Decque n’est pas un virtuose de la technique du dessin ou de la peinture. Ce qui ne lui nuit en rien. Ainsi, un travail de sculpture peut bien se résumer à un cheval ailé bricolé avec des bouts de cageots. Suspendu dans les airs, en forêt, son Pégase n'en offrira pas moins un instant de magie pure. Et quand il « grave », « c’est avec l’outil du pauvre : le tampon », pour déboucher sur des situations ludiques et étonnamment justes. Comment, d’ailleurs, rester insensible à l’imaginaire d’un artiste qui « caresse les paysages », soulignant d’un tapis de bûches l’ondoiement léger d’un pré ?
On le voit : l’imaginaire de Decque ne sacrifie pas à la préciosité. « J’aime utiliser les matériaux bruts…» dit-il encore. Un bloc de sel extrait des mines de potasse devient, grâce à un système rustique de présentation, le fragile témoignage d’une civilisation perdue. Et des milliers de gobelets remplis d’eau offrent dans un bassin une sculpture géométrique plane, scintillante, belle. Encore et toujours cette fragmentation, cet attachement à « un élément dépassé par son accumulation ».
Présent au Jardin des Deux Rives, côté français (son petit peuple d’arrosoirs en lévitation ne passe pas inaperçu), Decque est aussi l’invité de la galerie strasbourgeoise du Zoo, pour une exposition qui évoque largement son travail. On ne parlera pas encore, à sa cinquantaine débutante, d’une rétrospective, mais la variété de ses propositions plastiques y est affirmée ; «Je me demande d’ailleurs si le fait de rebondir sans cesse sur d’autres formes, sans recycler indéfiniment le même type de boulots, ne joue pas contre moi. Du coup, on à parfois du mal à m’identifier, à me prendre au sérieux…». On a tort : Decque est un artiste extraordinairement VIVANT.

Serge Hartmann, DNA du 05 juin 2004.